« Ne pas combattre le mal par le mal, il faut la paix »

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Mis à jour le 17/10/2020 | Publié le 05/12/2017

La perception du terrorisme par les sociétés implique que nous allions à la rencontre de la jeunesse, celle qui se construit et constituera la société de demain. Nous proposons donc une immersion dans une classe de 4ème au collège Elsa Triolet dans le 15ème arrondissement de Marseille. Où Farès, Yanis, Omri, Estelle, Max, Nabil et d’autres se sont exprimés en énonçant des mots puis des phrases qui ont donné naissance à un débat sur la question de leur ressenti face au terrorisme. Une belle réflexion est née de leurs échanges les conduisant à énoncer leur propre définition du terrorisme.

Il est 11 heures à Saint-Antoine, un quartier au nord de Marseille. Des hommes aux visages ridés prennent le café sur la place devant la porte du collège Elsa Triolet, rappelant l’ambiance villageoise, propre à de nombreux arrondissements de la cité phocéenne. Après avoir passé deux portes sécurisées, la vision de la cour est animée. La sonnerie vient de retentir, les élèves s’affairent d’une classe à l’autre et traversent à la hâte cet espace récréatif, cœur de l’établissement où l’on devine un cloître, partie réservée à l’éducation des jeunes filles dans des temps plus anciens.
Au premier étage juste au dessus du CDI, j’ai rendez-vous avec une classe de 4ème et leur professeur, très motivée par ce projet de réflexion autour du terrorisme.

Ici, on entre dans le calme, on apprend à s’écouter. En 4ème, les élèves participent à des débats philosophiques afin de développer leur esprit de réflexion et ont adopté une gestuelle qui leur permet d’exprimer leur accord et ou désaccord et de les exprimer tour à tour.

Qu’est-ce-que vous évoque le terrorisme ?

« La mort, les attentats, c’est la peur et c’est triste, les armes, la violence, la police, le danger, le stress, les explosions, la tristesse, Daech, il faut agir s’il y a une personne blessée, des victimes, l’inquiétude, les familles détruites… »

Le débat s’est ensuite arrêté sur la notion de peur afin de savoir comment se comporter face aux actes terroristes.
Max : « Je pense qu’il ne faut pas avoir peur parce qu’ils veulent que nous ayons peur, donc si on a peur, en fait ils gagnent », Faustine : « Je ne suis pas d’accord car on est obligé d’avoir peur car on peut mourir du jour au lendemain. » Estelle : « Je pense qu’il ne faut pas avoir peur, il faut rester comme on est, parce qu’il ne faut pas se dire, il ne faut pas que je sorte parce qu’il va y avoir un attentat. » Max : « Il ne faut pas avoir peur sinon ils vont continuer. »
« Si on a peur de mourir, on ne peut plus vivre avec cela en tête tous les jours ». Élève 1 : « Qu’on ait peur ou pas, ils tuent tout le monde, ils n’ont pas besoin de notre avis. »

« Le terroriste en fait, veut se suicider et faire peur à d’autres personnes. »

Élève 2 : « Je pense que les terroristes sont des gens fragiles, ils sont faibles et on peut facilement leur retourner la tête. C’est pour ça qu’ils se suicident pour des choses qui sont peut-être inventées ». « Qu’est ce que cela te fait personnellement ? » « C’est sûr, il y a une menace mais il ne faut pas avoir peur, car ils utilisent des choses qui existent, ils les modifient et ils font croire à des gens que c’est vrai. Les gens qui ont peur vont croire en ce qu’ils disent, et vont multiplier les actes terroristes ». Yanis : « Je pense qu’il faut avoir peur car ils n’ont rien à perdre, ils se sont entraînés à tirer, donc il faut avoir peur d’eux. » Faustine : « Qu’on aie peur ou non, ils continuent.» Elève 3 : « Le risque est que l’on se tue intérieurement ».

Schéma réalisé par les élèves du collège Elsa Triolet dans le 15eme arrondissement de Marseille

« Les médias veulent avant tout faire de l’audience »
Elève 2 : « Les médias veulent surtout de l’argent et vont montrer ce qui fait de l’audience, et en priorité les événements en France. Ils ne montrent pas les autres pays, il y a des pays qui sont oubliés, comme certains pays d’Afrique. S’il y a un attentat en Amérique, ils vont le montrer en Allemagne et en Europe mais certains pays d’Afrique, ils ne le montrent pas alors que c’est parfois bien pire qu’en France et en Europe ». « En Syrie, il y en a tous les jours mais on n’en parle pas ».
Faustine : « Pour moi c’est du favoritisme. Les médias choisissent de parler de certains pays mais par contre le pays où il y en a le plus et où ils souffrent le plus, ils ne les montrent pas. » Élève 2 : « Ils veulent montrer des pays avec des valeurs, développés, sans problèmes politiques. Comme au Nigeria, il y a des conflits depuis longtemps, ils vont moins le montrer. Mais en France, où d’habitude il n’y a pas trop de conflit, on va beaucoup en parler ».

« Quelles conséquences pour nos libertés ? »

Estelle : « Oui, on a peur de prendre le métro en pensant qu’il pourrait nous arriver quelque chose. Si quelqu’un nous poignarde tout d’un coup, comme les filles tuées à Marseille justement, après on a peur de sortir de chez soi, on a peur de tout. » Farès : « Quand je prends le bus avec ma mère, j’ai peur que quelqu’un me tue, donc cela me fait peur. Quand je vois la télé cela me fait peur. »
« Qu’est ce que cela a changé pour toi, dans ton quotidien ? » « rien, je suis restée comme je suis ». Élève 4 : « Je pense que ce n’est pas à nous de faire attention mais c’est à l’État. Si par exemple quelqu’un fait un voyage pour commettre un attentat, ce n’est pas de notre faute, ils doivent surveiller. » Élève 2 : « Par exemple Donald Trump pense qu’en fermant les frontières il va pouvoir enlever le terrorisme de son pays, mais il empêche les gens de voyager alors que ce ne serait pas des terroristes. C’est dommage car en Amérique il y a des choses bien aussi. En France, on peut encore voyager mais c’est plus compliquer qu’avant. »

Réactions et responsabilités des États : « Trump a fermé les frontières »

« En parlant de Trump, s’il arrêtait la vente d’armes aux Etats Unis, il n’y aurait pas d’attentat. En France c’est pareil, ils vendent des armes et après quand on a des attentats ils se plaignent. »
Élève 2 : « Après les gens ont peur entre eux. Je n’ai pas envie d’être raciste mais par exemple s’ils voient un maghrébin, ils vont tout de suite penser à ça alors que cela peut être tout le monde. « Tu l’as ressenti, personnellement ? » « J’ai un exemple, Marine le Pen est très raciste, c’est ça le problème, ce sont les politiques. Donald Trump, il ferme les frontières, certains ils veulent être président, et faire des lois sur les races des gens et les empêcher de circuler. C’est le cas pour les pays africains mais pas d’autres pays, c’est du racisme et cela prive les libertés de certaines personnes alors qu’elles n’y sont pour rien dans cette histoire et c’est eux qui sont ciblés. »
Elève 2 : « Moi je pense qu’il ne faut pas combattre le mal par le mal, certains pays engagent une guerre après les actes terroristes dans leur pays, et ce n’est pas bien car il faut la paix. La violence prive de liberté des gens ou les tue. Par exemple ils bombardent des pays, et personne ne le sait, il n’y a aucun moyen de le savoir. »

« Nous citoyens, que pouvons-nous faire ? »

Nabil : « On pourrait faire des associations antiterroristes de protection civile. La protection citoyenne. » Camelia : « Les associations c’est bien, mais on ne pourra pas arrêter les terroristes. » Nabil : « On pourrait faire plus de contrôle ». Faustine : « Par exemple, il pourrait y avoir plus de gens dans l’armée et les personnes qui ne savent pas quoi faire pourraient s’engager dans l’armée pour renforcer les troupes. » Eli : il faudrait créer des diplômes pour avoir des gens qualifiés pour fouiller les sacs des personnes pour éviter les bombes. »
Max : « Je suis d’accord aussi, il faudrait que les personnes qui nous fouillent dans les grands magasins, fassent plus attention, qu’ils soient plus qualifiés pour cela parce que souvent, quand je vais dans les magasins, la personne regarde à peine le sac, elle regarde même pas ce qu’il y a dans la veste. »
« Donc vous voulez une société plus contrôlée ? »
Max :« Mieux contrôlée ».
Farès : « Si on s’engage en association ce n’est pas pour arrêter les terroristes mais pour les repousser afin qu’il y ait moins de morts. Et ça c’est bien. »
Estelle : « On cherche juste la sécurité, et à être bien. Comme l’exemple des sacs fouillés, ils regardent même pas s’il y a une arme cachée ».

« Empêcher les terroristes de divulguer leurs idées »

Élève 2 : « Il faut aussi les empêcher de divulguer leurs idées, par exemple, bloquer leurs sites internet, mais si cela ne suffit pas, les médias devront aussi moins en parler car en parlant d’eux, les informations diffusent leurs idées et leurs volontés sans le vouloir. Par exemple, ils disent « ils veulent la haine », cela peut se propager, il faudrait donc trouver un moyen afin de les empêcher de communiquer avec le monde».